Le petit parapluie rouge

Parfum emblème :
Arizona
de Proenza SCHOULER

Pour cette histoire qui se passe en Arizona il m’a semblé évident de choisir cette eau de parfum pour femme de Proenza SCHOULER qui est une marque récente des Etats-Unis. . 

Le parfum Arizona de Proenza Schouler lancé en 2018 est une fragrance florale et minérale, conçue pour évoquer un sentiment d’aventure et de liberté. Inspiré par les paysages désertiques de l’Arizona, ce parfum met en avant des notes d’iris lacté et de fleur blanche de cactus, créant un mélange solaire et envoûtant. Les notes de tête sont Mandarine, Orange et Bergamote; les notes de cœur sont Fleur de cactus, Notes solaires, Fraise, Fleur d’oranger, Jasmin et Rose; les notes de fond sont Racine d’iris, Bois de cachemire, Musc et Vanille.

Le flacon, avec ses formes asymétriques et organiques, reflète la beauté brute et indomptable de la nature. Ce parfum est une collaboration entre Proenza Schouler et L’Oréal, marquant une incursion réussie de la marque de mode dans l’univers de la parfumerie.

Durée de lecture : 9 mn 30s

    J’ai les cheveux qui frisent et je déteste ça. Je fuis l’humidité dès que je le peux. Je suis une adepte des manteaux, imperméables, et autres anoraks à capuches. Le séchoir à cheveux et le parapluie sont mes meilleurs amis. Chaque semaine c’est brushing et à la moindre humidité, la moindre petite bruine innocente, mon beau travail se transforme en « pétard » et retour à la case zéro. Où que j’aille j’ai pris l’habitude de transporter mon petit parapluie avec moi. J’ai tout de même quelques tolérances si la destination est un pays où il fait très chaud et très sec. Dans ces conditions j’accepte de ne pas l’emporter dans ma valise. 

En 2009 nous avions organisé un grand périple en voiture avec les enfants, couvrant une partie de la Californie et de l’Arizona. 

C’est sous un soleil de plomb proche des cinquante degrés que l’on quittait, un beau matin, la ville de Phoenix pour monter plein nord en ligne droite vers le Grand Canyon qu’il nous tardait de découvrir pour la première fois. 

Le paysage, très plat et tout d’abord très désertique, seulement clairsemé de touffes d’herbes sèches, changea petit à petit pour un décor de cinéma. D’abord apparurent les petits cactus puis au fur et à mesure que l’on filait vers le nord ils se transformèrent en ces cactus géants et majestueux dignes des plus grands films d’Ennio Morricone. Le paysage défilait sous nos yeux avec fascination et nous nous arrêtions fréquemment pour prendre des photos. Au bout de trois heures de route sous un soleil torride et une chaleur accablante, celle-ci a soudain commencé à prendre de la hauteur. Les grands cactus ont laissé peu à peu la place à une végétation plus verte, plus haute et au bout d’une heure de trajet supplémentaire notre chemin était bordé des deux côtés par de grands sapins. Nous étions passés sans le savoir d’une région désertique à une région de montagnes d’un beau vert foncé. 

Aux États-Unis tout est immense. Les maisons, les chambres d’hôtel, les lits, les frigos, les machines à laver, les steaks, tout est gigantesque. Il en va de même pour la pluie. Qu’ils proviennent de l’homme ou de la nature, tout est dans des proportions démesurées. 

Nous roulions tranquillement quand tout à coup, à une vitesse étonnante le ciel s’assombrit, se couvrant de nuages noirs. Une première petite goutte s’écrasa sur le pare-brise, suivie d’une seconde plus grosse. En l’espace de cinq minutes nous étions sous une pluie torrentielle avec des gouttes de la taille d’une bille. Conduire était devenu impossible, voire extrêmement dangereux. Au point qu’il a fallu se ranger sur le bas-côté pour laisser passer l’orage. Cet orage a laissé un vrai souvenir dans notre mémoire familiale. Le matin nous étions dans un désert et l’après-midi nous recevions des trombes d’eau d’une violence inouïe. Mais cela ne dura pas plus d’un quart d’heure. De façon surprenante, après quinze minutes la pluie s’arrêta et le soleil revint. Mais alors que nous avions repris la route, mon cerveau cogitait et était entré en alerte. Moi qui essaye de toujours tout anticiper, tout préparer, je n’avais eu aucune connaissance du type de temps que l’on pouvait avoir dans cette région en été. Mon seuil de tolérance à l’humidité était explosé. Nous étions arrivés dans une zone où la potentialité de pluie était proche des 80%. Et moi je n’avais rien pour me protéger de cela, sachant que le lendemain nous devions visiter le Grand Canyon, zone totalement inabritée et ouverte aux caprices de la nature. 

Arrivés à destination, Grand Canyon Village, on prenait possession de notre chambre d’hôtel et on déposait nos bagages puis on ressortait très vite pour découvrir ce nouveau lieu très fréquenté. Pour éviter un nombre trop important de véhicules sur le canyon en période estivale, un va et vient de navettes gratuites sont à la disposition des touristes. L’hôtesse d’accueil de l’hôtel nous avait dit qu’on pouvait aller se renseigner sur les horaires des navettes au General Store situé non loin. 

Après avoir pris connaissance des horaires de départ pour le lendemain nous faisions un tour dans le store, découvrant avec amusement les vêtements pour cowboys, les viandes séchées sous vide et l’artisanat indien en provenance directe de Chine. La tentation étant trop forte nous avons céder pour les éternels magnets et autres stickers à coller sur la valise. Nous faisions la queue à la caisse quand mon regard se posa sur un panier placé juste devant et rempli de petits parapluies pliables à cinq dollars. Je n’ai pas réfléchi une seconde avant de plonger la main dedans et en choisir un rouge à ouverture manuelle. 

    – Ah non tu ne vas pas recommencer ! – s’est écrié mon mari.

    – Tu as vu comme il a plu tout à l’heure ? Et demain on n’a rien pour s’abriter !

   – Mais c’était passager. Même si on reçoit trois gouttes ça sèche très vite. Tu t’en fiches de ton brushing, personne ne va te regarder. Ici tout le monde est libre de se balader comme il veut. Ne soit pas ridicule avec ton parapluie, on a assez de bagages comme ça !

    – Si tout le monde est libre ici alors moi aussi je suis libre !

Et je posais mon parapluie sur le comptoir de la caisse. Mon mari haussait les épaules mais ne fit rien pour m’en empêcher. Il savait que cela aurait été inutile et se disputer pour ce genre de détail n’est pas dans nos habitudes. 

Le lendemain matin, après un petit déjeuner copieux, nous rejoignions à nouveau le General Store pour attendre la navette qui partait à dix heures vers le Grand Canyon. Une demi-heure environ après notre départ, nous arrivions sur le site. Je comprenais tout de suite l’utilité de ces navettes. Il y avait un monde fou, probablement plusieurs milliers de personnes et les parkings de petite taille étaient dissuasifs. Cela aurait été une très mauvaise idée d’y débarquer avec notre voiture. Le site avait une configuration assez simple. La route pour y arriver, toujours bordée par les grands sapins, puis une seule route qui longeait tout le canyon. Nous sommes descendus tous les quatre de la navette, nous avons traversé la route unique et enfin nous arrivions au bord du célèbre Grand Canyon. Et là LE CHOC !

J’avais lu que les premiers conquistadors qui étaient arrivés au bord du Grand Canyon étaient descendus de leur cheval, s’étaient mis à genou et avaient fait une prière. Au moment où je posais les yeux sur cette immensité j’ai repensé à cette histoire. Mieux que cela, je me suis dit que je venais de ressentir la même chose qu’eux à ce moment-là. Où que mes yeux portaient ce n’étaient plus que des successions de rocs découpés et creusés par la nature et qui s’enfonçaient loin sous nos pieds. Des millénaires d’érosion et d’événements climatiques qui avaient donné naissance à des strates de couleurs allant de l’ocre au rouge. Des rochers de la taille d’un camion et tenant en équilibre précaire comme par un fait miraculeux. Et très loin, 1500 mètres plus bas, d’un beau vert émeraude, le Colorado qui coulait et serpentait parmi ces géants de pierre. Ma famille, comme tous ces visiteurs de passage, était subjuguée par autant de beauté. Nous étions éblouis par ce que la nature est capable de faire ou défaire et qui nous ramène toujours à notre pauvre condition de petite fourmi face à ce spectacle. 

Nous étions en train de mitrailler le paysage de photos quand soudain des nuages venus d’on ne sait où apparurent au loin et commencèrent à se regrouper de façon inquiétante au-dessus de nos têtes, obscurcissant ce ciel jusqu’ici bleu et limpide. On sentait que le phénomène de la veille, rapide mais violent, allait probablement se reproduire. Les visiteurs détachèrent les yeux du spectacle que leur offrait le canyon pour les lever tout d’abord vers le ciel puis immédiatement après balayèrent du regard la route et ses environs, essayant de repérer ce qui comme une évidence allait manquer : un abri. 

Les premières gouttes s’écrasèrent doucement sur nos têtes, immédiatement suivies d’une nouvelle série de taille supérieure. En quelques minutes, la bruine d’été se transforma en un furieux orage, heureusement sans vent. Les gouttes, énormes, tombaient drue et tout droit, en un mot, le ciel nous tombait sur la tête.  Les touristes affolés commencèrent à courir et passer devant nous à toute allure, telle une volée de moineaux effrayés, se dirigeant vers la seule possibilité de repli, la boutique cadeaux située à 300 mètres de là. 

En ce qui nous concerne, que dire ? Je regardais mon mari avec un petit sourire et sans le quitter des yeux je plongeais la main avec une suave délectation dans mon grand sac et en retirais mon achat de la veille. J’ouvrais le parapluie comme au ralenti puis pointait l’index vers chacun de mes deux enfants.

    – Toi et toi, sous le parapluie.

    – Toi, dis-je en montrant mon mari, tu te débrouilles ! 

Ne croyez surtout pas qu’il faisait la tête. Il avait plutôt « son sourire du joker ». Alors que tous les gens autour de lui détalaient aussi rapidement que possible, l’appareil de photo encore en main il prit quelques secondes pour nous immortaliser tous les trois sur la pellicule puis il détala à son tour en direction de la boutique. Très vite le vide se fit autour de nous. La foule compacte avait disparu comme par enchantement. Collés l’un contre l’autre sous cet abri d’efficacité limitée je regardais autour de moi étonnée. Parmi tous ces touristes en short venant de tous les coins du monde et qui couraient dans la même direction, s’abritant maladroitement de leur plan du site, la seule qui avait amené un parapluie c’était…moi !

Après un moment à rire ensemble du spectacle, j’annonçais aux enfants :

    – Et si on allait nous aussi voir cette boutique ?

Et tous les trois, sans trop se presser, profitant de voir ce paysage fantastique sous la pluie et vide de sa foule, nous atteignions à notre tour la boutique de cadeaux. Quand je parle de boutique, vous avez peut-être la vision d’une petite boutique à la française. Mais c’était une boutique « à l’américaine », héritant de la démesure dont je parlais précédemment. Essayez plutôt d’imaginer une immense bâtisse, très haute, très large, remplie de tout ce qui pourrait évoquer de près ou de loin la vie ou l’histoire du canyon, équipée d’un grand café pris d’assaut par la vague de touristes dégoulinants voulant se restaurer.

Mon mari, trempé des pieds à la tête, nous attendait à l’entrée en guettant notre arrivée. Mes enfants s’échappèrent très vite pour faire le tour des rayons et moi je m’arrêtais devant lui, refermais délicatement mon parapluie tout en le regardant.

    – Alors ? Qui est ridicule ici ?

Dis-je avec un air jubilatoire qui se transforma aussitôt en rire devant son sourire hilare. Plus jamais après cela il ne se mêla de mes histoires de parapluie.

Fin

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